La régulation des loyers d’habitation à Dakar
La régulation, est-ce la solution pour faire face à la hausse des loyers à Dakar ?
Une véritable chimère qui loin d’avoir des effets bénéfiques escomptés, occulte la réalité du déficit chronique de logements au profit des populations. Ce déficit ne peut être résolut que par une politique volontariste et innovante relative à l’accès au foncier, au financement et à la fiscalité immobilière.
De la régulation des prix des loyers d’habitation
Depuis 1977, avec le Décret n°77-527 du 23 juin 1977 relatif au montant du loyer à usage d’habitation, les gouvernements successifs du Sénégal n’ont cessé de vouloir réguler le prix des loyers d’habitation.
En 40 ans, une dizaine de textes et lois ont ainsi été adoptés et des commissions mises en place pour contraindre les bailleurs à la modération sur l’augmentation des prix des loyers et les conditions financières liées. Ces dernières années, plusieurs pays de la sous-région, dont notamment la côte d’ivoire et le Burkina Faso, ont emboité le pas au Sénégal.
Mais force est de constater que tous ces efforts sont restés vains. Dakar est considéré aujourd’hui comme la ville la plus chère de toute la sous-région, prix du loyer en tête.
Le mécontentement gagne les locataires et la FACIS se sent injustement interpellé.
Ainsi lors d’une conférence de presse tenue le 30 novembre dernier, le secrétaire général de la fédération des agences et courtiers immobiliers du Sénégal (FACIS) a tenu à donner sa part de vérité.
Massamba Ndiaye a surtout expliqué le rôle des agences immobilières au Sénégal et laver l’honneur de sa corporation. En effet, ils sont accusés par la plupart des sénégalais d’être à l’origine de la flambée des prix du loyer et de l’introduction d’un mois de loyer à payer par le locataire au profit de l’agent immobilier.
Il reconnait un certain laissé-allé dans le secteur qui fait que n’importe qui peut se lever et se déclarer agent immobilier. Il appelle ainsi les acteurs et les pouvoirs publics à la professionnalisation et à la structuration de ce secteur d’activité.
« Il faut qu’on parle de l’anarchie au niveau du secteur de l’immobilier au Sénégal. Parce que nous ne pouvons pas être acteur de ce secteur immobilier, constater les pratiques qui se font dans notre secteur et ne pas en parler aussi. Parce que d’aucun accuse les agence immobilières, les professionnel de l’immobilier entre guillemets de spéculer sur le foncier et sur la cherté du loyer. Mais qui est agent immobilier ? Qui est professionnel de l’immobilier ? Qui est acteur de l’immobilier ? C’est vrai qu’on est dans un secteur d’activité mais pas un secteur anodin où quelqu’un peut se réveiller un beau matin et dire qu’il est acteur. Ce n’est pas un secteur ou le vigil, l’aide de maison ou n’importe qui eut se lever et dire qu’il est intermédiaire. C’est un grand souci pour nous les professionnels et il faut qu’on en parle. Nous sommes interpellés », a-t-il déclaré avant d’inviter l‘Etat à les aider à mieux encadrer le secteur par une identification des acteurs et une clarification des rôles et des prix à appliquer.
« Avec des représentants de l’Etat nous avons évoqué la question du courtier. Le courtage est un métier organisé et qui existe dans tous les pays du monde. C’est une prestation de service acceptée toutes les transactions commerciales. Cependant, cette activité doit se faire dans les règles de l’art sans abus ni usure sur les clients. Tous courtiers doit pouvoir être affilié à une organisation professionnelle avec un code de conduite et des prix vérifiables par tous et pour tous », a-t-il soutenu.
A la suite de cette sortie, le Ministre du commerce s’est contenté de rappeler le décret de 1977
Par lettre en date du 07 décembre 2021, le ministre du commerce et des PME a rappelé le Décret n°77-527 du 23 juin 1977 relatif au montant du loyer à usage d’habitation qui stipule en son article 7 que « le montant du cautionnement et des loyers à verser d’avance à titre de garantie ne peut excéder une somme équivalent à deux (2) mois de loyers ».
Au passage le Ministre a indexé la FACIS, occultant son appel lancé au gouvernement pour agir sur les trois (3) leviers majeur à même d’influencer concrètement le montant des loyers. Il s’agit de l’accès au foncier, des conditions de financement abordables et une fiscalité allégée.
L’ONU HABITAT prône le droit à un logement convenable
Le droit à un logement convenable recouvre plusieurs libertés dont la « capacité de paiement ». Toute personne devrait être en mesure de payer son loyer ou financer l’acquisition de son logement sans mettre en danger ses autres droits élémentaires.
Or la nature essentiellement commerciale du logement fait que son coût est tributaire de la « loi de l’offre et de la demande ». Tant qu’il y aura un déficit important de logements au Sénégal, le gouvernement a beau prendre des textes de régulation, les prix des loyers ne connaitront pas de baisse. Pire, le risque serait de voir se développer une culture de fausses déclarations de loyers, préjudiciable à l’Etat.
En 2020, le déficit en logement au Sénégal était estimé à environ 300 000 unités, avec environ 150 000 pour la seule ville de Dakar.
Conscient de ce défi, le Gouvernement Sénégalais s’est engagé dans le cadre du « plan Sénégal émergent » à construire 15 000 logements chaque année, avec les fameux projets de pôles urbains de Diamniadio et du Lac Rose.
Un effort certes colossal mais qui prendra 20 ans pour résorber le déficit actuel avec une population qui serait passé entre temps de 16 millions à environ 27 millions. Autant dire, une mission de rattrapage impossible.
Cette problématique du logement est commune à l’ensemble des pays de la sous-région ouest africaine et appel de la part des dirigeants à la réflexion et à l’innovation en matière de logement pour parvenir à des solutions pérennes et acceptable pour tous.